Bâtiments et parkings : obligation de production d’énergie renouvelable et de végétalisation
Quelles sont les obligations de la production d’énergies renouvelables et de végétalisation des bâtiments et de leurs parkings applicables en 2024?
Rappel des principes fixés par la Loi
Depuis la loi « Climat et résilience » du 22 août 2021, complété ensuite la Loi « énergies renouvelables » du 10 mars 2023, le code de la construction et de l’habitation (article L.171-4) prévoit que les bâtiments non-résidentiels doivent intégrer :
- soit un procédé de production d'énergies renouvelables,
- soit un système de végétalisation qui ne recourt en priorité aux eaux de récupération, garantit un haut degré d'efficacité thermique et d'isolation et favorise la préservation et la reconquête de la biodiversité,
- soit tout autre dispositif aboutissant au même résultat.
Le déclenchement de ces obligations de production d’énergie renouvelables et de végétalisation sont différentes selon la destination du bâtiment concerné :
- le seuil d'emprise au sol créée est de 500 m² pour
- les constructions de bâtiments à usage commercial, industriel ou artisanal,
- les constructions de bâtiments à usage d'entrepôt,
- les hangars non ouverts au public et faisant l'objet d'une exploitation commerciale
- la construction de parcs de stationnement couverts accessibles au public
- le seuil est fixé à 1 000 m² d'emprise au sol pour :
- les constructions de bâtiments ou parties de bâtiment à usage de bureaux,
Ces obligations s'appliquent également aux extensions et rénovations lourdes de bâtiments ou parties de bâtiment.
Pour les aires de stationnement associées, il s’agit des rénovations lourdes ou à l'occasion de la conclusion d'un nouveau contrat de concession de service public, de prestation de service ou de bail commercial, ou de son renouvellement.
Ces obligations sont réalisées en toiture du bâtiment ou sur les ombrières surplombant les aires de stationnement. La proportion de surface de toiture concernée fait l’objet d’un calendrier progressif :
- 30 % de la toiture depuis le 1er juillet 2023,
- 40 % à compter du 1er juillet 2026
- 50 % à compter du 1er juillet 2027.
De plus, les aires de stationnement qui sont associées aux bâtiments ou parties de bâtiments visés, et prévues par le projet, doivent favoriser l’infiltration de l’eau de pluie.
Doivent être intégrés des « revêtements de surface, des aménagements hydrauliques ou des dispositifs végétalisés favorisant la perméabilité et l'infiltration des eaux pluviales ou leur évaporation et préservant les fonctions écologiques des sols ».
Attention : un arrêté du 5 février 2020 du ministre chargé des installations classées a défini les conditions de mise en œuvre spécifiques pour les installations « ICPE » soumises au code de l'environnement:
Légifrance : arrêté spécifique pour les ICPE
Ainsi, l'obligation visée au I de l'article L. 171-4 du code de la construction et de l'habitat ne s'applique pas aux bâtiments abritant des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) au titre des rubriques 1312, 1416, 1436, 2160, 2260-1 2311, 2410, 2565, les rubriques 27XX (sauf les rubriques 2715, 2720, 2750, 2751 et 2752), les rubriques 3260, 3460, les rubriques 35XX et les rubriques 4XXX.
Les précisions apportées par les textes d’application
Les dispositions règlementaires, plus techniques, sont détailles ci-dessous, de manière synthétique.
Le décret d’application n°2023-1208 du 18 décembre 2023, accompagné d’un arrêté ministériel, a précisé les termes de la Loi. Il s’agit des nouveaux articles R. 171-32 et suivants du code de la construction et de l’habitation.
Lien vers les dispositions fixées par Décret
- Le décret précise qu’un bâtiment est soumis aux obligations (ENR ou végétalisation) lorsque la moitié de sa surface de plancher est affectée à un ou plusieurs des usages cités par l’article L. 171-4, indépendamment de l'usage auquel est affectée sa toiture (article R.171-32 du code de la construction et de l’habitation).
Il s’agit des usages commercial, industriel ou artisanal, entrepôt, hangars non ouverts au public, constructions de parcs de stationnement couverts accessibles au public, bureaux.
- Le Décret du 18 décembre 2023 a précisé que les travaux de rénovation lourde sont ceux qui ont pour objet ou qui rendent nécessaire le renforcement ou le remplacement d'éléments structuraux « concourant à la stabilité ou à la solidité du bâtiment » (art. R. 171-33).
- Les obligations sont réalisées en toiture du bâtiment ou sur les ombrières surplombant les aires de stationnement.
La proportion de la toiture du bâtiment construit ou rénové de manière lourde et des ombrières créées est définie par un arrêté du 19 décembre 2023 arrêté des ministres chargés de la construction et de l'énergie.
Les obligations sont réalisées sur une surface au moins égale à :
- 30 % de la surface de toiture du bâtiment construit ou rénové à compter du 1er janvier 2024,
- 40 % à compter du 1er juillet 2026
- 50 % à compter du 1er juillet 2027.
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000048707438
Les exonérations concernant les bâtiments
L’autorisation d'urbanisme peut prévoir que tout ou partie des obligations ne s'appliquent pas aux constructions et extensions ou rénovations lourdes de bâtiments
- en raison de contraintes techniques, de sécurité, architecturales ou patrimoniales, ne permettent pas l'installation des procédés et dispositifs. L'installation ne doit pas être de nature à aggraver un risque ou présenter une difficulté technique insurmontable ;
- lorsque cette obligation ne peut être réalisée dans des conditions économiquement acceptables.
Les critères relatifs aux exonérations ont été précisés par décret du 18 décembre 2023 qui créé des articles dans le code de la construction.
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006074096/LEGISCTA000048596046/
- les exceptions en raison de contraintes patrimoniales (art. R. 171-34)
Quels bâtiments ?
ceux situés aux abords des monuments historiques, le périmètre d'un site patrimonial remarquable, les sites inscrits ou classés, immeuble classé ou inscrit au titre des monuments historiques ou sur un immeuble protégé en application du code de l'urbanisme.
Les obligations s’appliquent si l'autorité administrative donne son accord ou autorise les travaux nécessaires pour satisfaire à ces obligations.
La demande d’autorisation d’urbanisme doit être complétée (art. R.171-35) selon le cas:
- d'une attestation du maître d'ouvrage qui justifie être concerné par l'une des exceptions, accompagnée des pièces justifiant l'exception à l'installation d'un système de production d'électricité renouvelable, à l'installation d'un système de production de chaleur renouvelable et à l'installation d'un système de végétalisation
- d’une attestation faisant état du projet d'installation d'un système de production d'électricité renouvelable ou d'un système de production de chaleur renouvelable ou d'un système de végétalisation, de nature à satisfaire aux obligations
- Concernant les contraintes techniques et architecturales
Le maître d'ouvrage joint à l'attestation (art. R. 171-35) un argumentaire du maître d'œuvre exposant les raisons techniques pour lesquelles :
- aucun système existant ne peut être installé sur le bâtiment ou la partie de bâtiment (art. R. 17138)
- la surface minimale ne peut être atteinte. Le maître d'ouvrage est alors tenu de présenter un projet permettant d'atteindre une surface la plus proche possible de cette surface minimale (art. R. 17139)
L'existence d'une contrainte technique est établie lorsque le bâtiment ou la partie de bâtiment faisant l'objet d'une rénovation lourde dispose d'une sur-toiture ventilée consistant en une paroi horizontale surimposée faisant office de pare-soleil ne permettant pas l'installation d'un système de production d'énergies renouvelables ou d'un système de végétalisation (art. R. 171-40)
- Contrainte architecturale
Lorsque la pente de la toiture est supérieure à 20 % (R. 171-41)
- Contrainte de sécurité :
Le maître d'ouvrage joint à son argumentaire l'avis défavorable ou assorti de prescriptions de la commission de sécurité compétente (art. R. 171-42)
- la prise en compte de coûts d'installation disproportionnés
La disproportion est établie lorsque le rapport entre le coût hors taxes des travaux nécessaires à l'installation d'un système de production d'énergies renouvelables ou de végétalisation et le coût total hors taxes des travaux de construction, extension ou rénovation dépasse un taux fixé par un arrêté ministériel (art. R. 171-36).
Calcul
- lorsque le coût des travaux est supporté par le maître d'ouvrage,
- si le coût hors taxes des travaux nécessaires à l'installation d'un système ENR ou de végétalisation,
- diminué des gains actualisés pouvant être obtenus par la vente de l'électricité produite sur une durée de 20 ans ou par les économies d'énergie réalisées sur la durée de vie de l'équipement, et diminuée des autres dispositifs de soutien financiers,
- excède 15 % du coût total hors taxes des travaux
- La durée de vie de l'équipement à prendre en compte ne peut pas être inférieure à 20 ans.
- lorsque le coût des travaux est supporté par un tiers investisseur, si le reste à charge hors taxes excède 15 % du coût total hors taxes des travaux.
Le maître d'ouvrage doit joindre une note détaillant le calcul comparatif :
- du coût hors taxes des travaux nécessaires à l'installation du système
- et du coût total hors taxes des travaux.
Cette note est accompagnée de deux devis d'entreprises spécialisées dans l'installation de systèmes de production d'énergies renouvelables ou de végétalisation.
Une étude technico-économique d'une entreprise spécialisée doit présenter :
- la production d'électricité ou les économies d'énergie prévisionnelles,
- les revenus associés,
- le cas échéant, le coût actualisé de l'énergie produite par l'installation.
Cette étude de moins de 6 mois au moment du dépôt de la demande d'autorisation d'urbanisme ou, à la date d'acceptation des devis ou contrats de travaux de rénovation.
Les dispositions s'appliquent aux bâtiments et parties de bâtiments faisant l'objet de demandes d'autorisations d'urbanisme déposées à compter du 1er janvier 2024 ou, pour les travaux ne nécessitant pas d'autorisation d'urbanisme, lorsque la date d'acceptation des devis ou de passation des contrats relatifs aux travaux de rénovation est postérieure au 1er janvier 2024.
Concernant les caractéristiques de la végétalisation
Un arrêté du ministre chargé de la construction du 19 décembre 2023 a fixé les caractéristiques minimales que doivent respecter les systèmes de végétalisation installés sur le bâtiment.
L’épaisseur minimum de substrat après tassement doit être de 10 cm pour les constructions neuves et les extensions et de 8 cm pour les rénovations de bâtiments existants.
La rétention maximale en eau du substrat, ou capacité maximale en eau (CME), est supérieure ou égale à 35 % en volume. Le système de végétalisation installé en toiture utilise un minimum de 10 espèces végétales différentes, adapté aux conditions climatiques locales et tient compte des écosystèmes et paysages locaux.
Ces obligations s’appliquent aux bâtiments et parties de bâtiments faisant l’objet de demandes d’autorisations d’urbanisme déposées à compter du 1er janvier 2024 ou, pour les travaux ne nécessitant pas d’autorisation d’urbanisme, lorsque la date d’acceptation des devis ou de passation des contrats relatifs aux travaux de rénovation est postérieure au 1er janvier 2024.
Les obligations applicables aux parkings
L’article L.111-19-1 du code de la construction et de l’habitation soumet les parcs de stationnement extérieurs de plus de 500 m² associés aux bâtiments ou parties de bâtiment concernés, ainsi que les nouveaux parcs de stationnement extérieurs ouverts au public de plus de 500 m².
- Au moins la moitié de leur surface doivent intégrés des revêtements de surface, des aménagements hydrauliques ou des dispositifs végétalisés favorisant la perméabilité et l'infiltration des eaux pluviales ou leur évaporation.
- doivent intégrer des dispositifs végétalisés ou des ombrières concourant à l'ombrage du parc sur au moins la moitié de la surface, si ces dispositifs n'est pas incompatible avec la nature du projet ou du secteur d'implantation et ne porte pas atteinte à la préservation du patrimoine architectural ou paysager.
Si lesdits parcs comportent des ombrières, celles-ci intègrent un procédé de production d'énergies renouvelables sur la totalité de leur surface.
Au titre de l'obligation d’équipement des parcs de stationnement, le Décret précise que les parcs de stationnement sont "ceux qui ne sont pas intégrés à un bâtiment" et qui sont assujettis à :
- l’obligation d’intégrer des revêtements de surface, des aménagements hydrauliques ou des dispositifs végétalisés favorisant la perméabilité et l’infiltration des eaux pluviales ou leur évaporation
- à l’obligation d’intégrer des dispositifs végétalisés concourant à l’ombrage de ces parcs ou des ombrières intégrant un procédé de production d’énergies renouvelables (art. R. 111-25-1)
Est considérée comme une rénovation lourde d'un parc de stationnement, le remplacement total du revêtement de surface au sol sur une superficie représentant au moins la moitié de la superficie du parc de stationnement (art. R.111-25-2).
La somme des superficies avec remplacement total du revêtement de surface au sol, sur une période de quinze ans, dépasse la moitié de la superficie totale
Exonérations prévues pour les parkings
Les obligations ne s'appliquent pas aux parcs de stationnement en raison de contraintes techniques, de sécurité, architecturales ou patrimoniales, ou ne peut être satisfaite dans des conditions économiquement acceptables du fait de contraintes techniques (article R. 111-25-3)
Un décret en Conseil d'Etat précise les critères relatifs à ces exonérations.
- contraintes techniques liées à la nature du sol, telles que la composition géologique ou l'inclinaison de celui-ci ;
- l'impossibilité technique de ne pas aggraver, en conséquence d'une telle installation, un risque naturel, technologique ou relatif à la sécurité civile
- contraintes techniques liées à l'usage du parc de stationnement, le rendant incompatible avec une telle installation. Art. R. 11125-4.
Chacun de ces procédés et dispositifs est impossible en raison de coûts totaux hors taxes des travaux liés au respect de l'obligation qui compromettent :
- la viabilité économique du propriétaire du parc de stationnement
- ou, lorsque ces coûts, parce qu'ils sont renchéris par une contrainte technique, s'avèrent excessifs (art. R. 111-25-6)
Le caractère excessif du coût des travaux est établi par le dépassement d'un rapport entre le coût total hors taxes des travaux liés au respect de l'obligation et :
- soit le coût total hors taxes des travaux de création ou de rénovation du parc incluant la mise en œuvre hors contrainte technique particulière
- soit la valeur vénale du parc au jour de la demande d'exonération si les travaux ont pour seul objectif de satisfaire à cette obligation lors de la conclusion d'un nouveau contrat de concession de service public, de prestations de service ou de bail commercial ou renouvellement.
Dispositifs d'ombrage
Lorsque l'ombrage du parc de stationnement est assuré par des arbres, l'obligation mentionnée à l'article R. 111-25-7 est satisfaite par la plantation d'arbres à canopée large, répartis sur l'ensemble du parc, à raison d'un arbre pour trois emplacements de stationnement (art. R. 111-25-8)
Exonération des dispositifs d'ombrage du parc de stationnement s’il est démontré que l'installation de chacun de ces dispositifs est impossible en raison de :
- contraintes techniques liées à la nature du sol, telles que la composition géologique ou l'inclinaison de celuici
- impossibilité technique de ne pas aggraver, en conséquence d'une telle installation, un risque naturel, technologique ou relatif à la sécurité civile
- contraintes techniques liées à l'usage du parc de stationnement, le rendant incompatible avec une telle installation. (art. R. 111-25-9)
Si les contraintes techniques ou d'un ensoleillement insuffisant engendrant des coûts d'investissement portant atteinte de manière significative à la rentabilité de cette installation (art. R. 111-25-11).
La rentabilité de l'installation est affectée de manière significative
le coût actualisé de l'énergie produite par cette installation sur une durée de 20 ans dépasse la valeur du tarif d'achat ou du tarif de référence utilisé pour le calcul des revenus pouvant être obtenus par la vente de l'électricité produite par l'installation, multiplié par un coefficient (définis par un arrêté conjoint des ministres chargés de l'urbanisme et de l'énergie).
Une attestation est jointe à la demande d'autorisation d'urbanisme.
Dans le cas d'une demande d'exception de l'installation d'ombrières comportant des panneaux photovoltaïques, cette attestation comprend une étude technico-économique réalisée par une entreprise disposant d'une qualification spécifique.
Les dispositions du décret s'appliquent aux parcs de stationnement faisant l'objet :
- De demandes d'autorisations d'urbanisme déposées à compter du 1er janvier 2024
- De la conclusion ou du renouvellement d'un contrat de concession de service public, d'une prestation de services ou d'un bail commercial portant sur la gestion de ces parcs intervenant à compter du 1er janvier 2024.
Romain LEMAIRE